BEUNER, dans divers patois.
Jean, ch'malicieux, i s'fout d'mi; i m'écrit que j'beune* vu que j'n'a pont moutré mes dernières pièches que j'arrinche à m'façon dins min coin.
I crot que j'sus toudis in train d’beuner !
Pourtint i m'connot fin ben et i sait que ch'est pont d'mes fachons d'faire.
*beuner: Christian Defrance a fait ses recherches sur ce verbe et les a publiées dans: L'Echo du Pas-de-Calais n°73 - Avril2006
"Il fronce les sourcils quand ce n’est pas son nez… Les rides se creusent, les lèvres cherchent des noises à la moustache. Le regard est hagard. Alors, la mère n’hésite pas une seconde et lance « cha y est té beunes ! »
Voilà un verbe haut en couleur patoisante : beuner. Rien à voir avec beuler (beugler), beuter (regarder pour surprendre)… Beuner c’est bouder.
Beuner, beugner, bugner, buner – selon que l’on soit un picard du nord, du sud ou du mitan – c’est être pensif, triste, abattu.
(On peut aller) plus loin dans la définition : « Se dit de l’homme qui ne répond pas quand on lui parle et qui reste la tête basse, sans bouger de place ; de la vache qui reste immobile le mufle touchant terre sans vouloir pâturer. »
C’est encore le moyen de sortir d’une situation embarrassée, de vaincre une difficulté. Et celui qui beune, « ch’est un beunar ! »
Dans un dictionnaire du patois de Lumbres, un décryptage étymologique (indique) que "beuner" dériverait du vieux francique « bunia, tronc d’arbre ». En vieux français, la buyne ou buigne est une bosse… Dans notre français d’asteure, nous avons toujours la beigne.
L’affaire se corse quand on sait que beuner, beugner en patois ça veut dire aussi « heurter, se cogner » ! « I’a été s’beuner conte ech mur. »
De la souche d’arbre à la bosse en passant par la léthargie boudeuse, on peut dire que la langue ne manque jamais de piquant.
Beugner est donc courant chez les patoisants picards, mais aussi dans le parler creusotin (heurter quelque chose de dur et se faire une bosse), le parler lorrain (abîmer), le parler de Saint-Claude (heurter, meurtrir), le patois comtois, le patois bourbonnais, le patois de la Haute-Marne… Un proverbe charentais dit « à se beugner le calâ cont' les murs, o ne vint que des bosses ! À se cogner la tête contre les murs, on ne parvient à rien ! » Alors comme ajouterait la mère, « pont la peine eud beuner »."
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